Georges Vézina (1887-1926)

Georges Vézina

(1887-1926)
Gardien de buts du Canadien de Montréal
(Saisons 1910 à 1925)

 

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Le trophée Vézina

GEORGES VÉZINA
(1887 – 1926)

(ajouts faits en janvier 2010)

Quel amateur de hockey au Québec, n’a pas un jour entendu parler de Georges Vézina, ce fameux gardien de buts du club Le Canadien de Montréal ?
Georges Vézina est un descendant de François L’Aîné, alors que son épouse Marie-Stella Morin est, par sa mère, de la lignée de François Le Puîné; donc des deux fils de l’ancêtre Jacques Vezinat.

Le grand-père de Georges, Jean Vézina, boulanger, est vraisemblablement le premier Vézina à s’établir au Saguenay. Il épouse Éléonore Laberge le 29 mai 1848 à la paroisse St-Alexis de Grande-Baie.
Quant à son père Georges, aussi boulanger, il épouse Clara Belley le 5 avril 1880 à la paroisse St-François-Xavier de Chicoutimi.

Georges jr, notre futur gardien de buts, naît le 21 janvier 1887. Il est le dernier des quatre garçons de la famille, après Ludger, Joseph, et Pierre (Pitre). Il a quatre sœurs : Imelda (Mère Marguerite du Sacré-Cœur, des Petites Franciscaines de Marie à Baie-Saint-Paul), Marie-Louise (mariée à Charles-Aimé Boily le 29-06-1910), Hélène-Émilie (mariée à J. David Victor Cloutier, le 22-09-1915), et Élisabeth, célibataire, née le 22 mars 1893.
Georges étudie au Séminaire de Chicoutimi de 1898 à 1902, mais « il quitte après la 2è année du cours commercial ». (1) Il n’aime pas les études et préfère aider son père dans son commerce. Celui-ci posséda jusqu’à trois boulangeries.

Deux sports passionnent Georges : le baseball l’été et le hockey l’hiver, dont il apprend les rudiments en jouant dans la rue, le soir, avec ses amis. Faute de posséder des jambières pour gardiens, il bourre ses pantalons de linge pour se protéger. Rondelles en bois, balles de tennis, glaçons et bottines aux pieds suffisent alors pour s’amuser entre amis. À 16 ans, il commence à garder les buts pour le club Chicoutimi. Pendant quelques années il s’exécute devant le but sans jamais chausser les patins. Il pratique ce qu’on appelait « le hockey de bottines » !
Nous sommes en 1909 et le hockey relève encore du sport amateur. Cependant, deux ligues récemment fondées désirent organiser le hockey professionnel et y intégrer le plus important club de hockey formé de Canadiens-français, le « National », afin d’y attirer les spectateurs francophones.
Les tractations conduisent le National dans la Canadian Hockey Association (CHA). Pour faire opposition à cette avantageuse acquisition, la National Hockey Association (NHA) fonde le club le Canadien le 4 décembre 1909. Commence alors une lutte serrée entre les deux ligues pour offrir aux joueurs les meilleurs contrats possible, ce qui amène rapidement la dissolution de la CHA. Seulement trois joueurs du National:Edgar LeDuc, Ed Miller (Millaire) et Patrick «Patsy» Séguin disputeront quelques parties avec le Canadien.
Celui-ci dispute « son premier match le 5 janvier 1910 devant une foule de 3,000 spectateurs à l’aréna Jubilee de Montréal ».(2) p.17 C’est au cours d’un match hors concours disputé le 20 février 1910 que le club amateur Chicoutimi écrase le club professionnel le Canadien 11 à 5, grâce aux prouesses de son gardien Georges Vézina. Jos Cattarinich, alors gardien de but du club Canadien, est très impressionné par la performance du gardien devant le filet adverse. Il aurait dit à ses voisins, en pointant Vézina : « Le voyez-vous, lui! C’est l’homme qu’il me faut. Je vais en faire le meilleur gardien de but qui soit jamais passé dans l’univers ». (3)

Georges Vézina (junior) épouse Marie-Stella Morin le 3 juin 1908 dans la paroisse Saint-François-Xavier de Chicoutimi. Le jeune couple est peu fortuné. Le beau-père, Charles Morin, leur offre l’hébergement pendant quelques mois. Georges travaille durant tout l’hiver; cependant, les revers de fortune de son employeur empêchent celui-ci de le payer. Grande déception pour Georges qui comptait s’acheter un ameublement avec cet argent.
Devant l’infortune du couple, Monsieur Morin lui fait un prêt qui lui permet de s’acheter une maison. Son beau-père dira de Georges qu’il n’a jamais eu débiteur plus ponctuel et plus reconnaissant. Il était homme de parole et celle-ci était inviolable. Les gens de Chicoutimi disaient : « une promesse de Georges est aussi solide que le Cap Trinité ». (3)
Georges est pourvu d’un esprit entreprenant, probablement hérité de son père. Il crée une petite manufacture de « portes et châssis » « La Maison Georges Vézina Limitée » qui engage une vingtaine d’hommes, quand tout fonctionne à pleine capacité.

Geroges et son epouse Stella MorinGeorges Vézina et son épouse Stella Morin

À la fin de la saison 1909-1910, le gardien de but du Canadien, Jos Cattarinich quitte son poste pour occuper d’autres fonctions et suggère de faire appel à Vézina. Pour s’assurer de la venue de celui-ci à Montréal, on invite aussi son frère « Pître », qui joue à l’avant, à venir à l’automne 1910, s’entraîner avec le club Canadien. Pierre revient à Chicoutimi, alors que Georges reste et signe son premier contrat avec le Canadien en décembre 1910.
Pierre rapporte ainsi la scène entre Georges Vézina et George Kennedy (Kendall, secrétaire-trésorier du club). Ils étaient seuls tous trois. « C’était dans une toute petite chambre mal éclairée de l’hôtel Riendeau. Quand ce dernier lui offrit $800.00 pour la saison, Georges fut stupéfait. Il ne s’attendait sans doute pas à cette somme. Cependant, il réprima toute surprise et signa ». (3) La majorité des joueurs reçoivent $1,000.00 et moins durant ces années. Toutefois, Didier Pitre, une des vedettes les mieux payées du club, avait reçu $1700.00, alors que le club de Renfrew (Ont.), plus fortuné, « …a offert des salaires fabuleux de $3,000.00 et $2,700.00 à ses quatre principales vedettes » (5). p.21

Georges joue sa première partie pour le Canadien contre les Senators d’Ottawa le 31 décembre 1910. Une brillante carrière de quinze ans commence pour lui, durant laquelle il garde les buts 328 fois sans en manquer une seule. Cette constance est d’autant plus remarquable, qu’à l’époque les clubs ne peuvent aligner qu’un seul gardien en uniforme. Il arriva quelques fois qu’un joueur dut, à pieds levés, remplacer son gardien blessé.

Dire que le hockey d’aujourd’hui est différent de celui d’autrefois est une vérité de La Palice, à commencer par le fait que les arbitres, encore en 1928, signalent les buts et les infractions au moyen d’une clochette. « Jusqu’aux années 1920, on jouait au hockey selon les règles du rugby, c’est-à-dire que seules les passes arrières et latérales étaient permises; le lancer frappé n’existait pas encore. Le gardien de buts… ne devait pas se jeter par terre pour arrêter la rondelle (cette possibilité ne sera accordée qu’à partir de la saison 1917-1918), ni la capter de sa main; il ne pouvait pas non plus l’immobiliser tout simplement. Alors, sa seule technique était de tenir son bâton à deux mains et d’utiliser son corps et son bâton pour arrêter les rondelles… ». (1) En un mot, il devait constamment demeurer debout et utiliser son corps comme un bouclier contre lequel tous les lancers venaient se heurter.
Le gardien ne revêt alors que les gants ordinaires d’un joueur pour tenir son bâton et arrêter du revers de la main la rondelle, contrairement au gardien d’aujourd’hui qui porte un gant (ou mitaine) véritable panier pour attraper le « poque », tandis que son autre main est protégée par une « planchette » de 8 x 15 pouces, appelée « bloqueur », qui lui permet d’arrêter les durs lancers sans ressentir aucune douleur.

Le gardien est surtout peu protégé au visage. Il faudra attendre au 1er novembre 1959, à New-York, pour voir Jacques Plante revenir sur la patinoire portant un masque, après avoir été sérieusement blessé à la figure. Il venait enfin d’obtenir l’autorisation de porter un masque dans les parties officielles, ce que lui avait jusqu’alors refusé Toe Blake, son entraîneur.
Le hockey, tel qu’il se pratique alors, favorise un nombre élevé de buts par partie. Il n’est pas rare de voir un club compter 7 ou 8 buts contre son adversaire. Voici quelques exemples extrêmes :

Ottawa vs Renfrew (Ontario) 19 à 5 (janvier 1911)
Canadien vs Wanderers (de Mtl) 15 à 5 (mars 1915)
Canadien vs Bulldogs (Québec) 16 à 3 (saison 1919-20)

Puisqu’elle dépend des conditions de la température, la saison de hockey ne peut être que de courte durée; on joue une vingtaine de parties par année. Avant l’automne 1924 la saison de hockey ne commence jamais avant le 15 décembre, pour se terminer fin-mars. Ça se comprend, on joue sur glace naturelle. Il arrive alors que les patinoires sont dans un état lamentable : glace molle, collante, qui rend les passes lourdes, ralentit le jeu et le déplacement rapide des joueurs. Tout le spectacle en souffre. Toronto est la première ville à donner à ses joueurs, au printemps 1914, une glace artificielle. À l’automne 1915 l’aréna de Westmount, où joue alors le Canadien, offre aussi la glace artificielle. «Elles sont les seules villes canadiennes à posséder pareil avantage » (2) p.23. Malheureusement, l’aréna Westmount est détruite par le feu le 2 janvier 1918.

Construite en trois mois, l’aréna Mont-Royal accueille le Canadien le 10 janvier 1920, mais ne peut lui offrir plus qu’une patinoire de glace naturelle. « La température clémente enregistrée en janvier 1921 force les Canadiens à reporter le match prévu contre Toronto le 21 du mois. La glace naturelle de l’Aréna Mont-Royal laisse apercevoir la terre à maints endroits » (2)p. 82. Encore en 1924, les supporteurs du Canadien se voient privés de célébrer chez-eux la conquête de la deuxième coupe Stanley; la dernière rencontre doit être jouée à Ottawa dans leur nouvel auditorium doté de glace artificielle. Le Canadien bénéficiera enfin de cette glace lorsqu’il aménagera au Forum en 1926.

D’une vingtaine de parties disputées dans les débuts de la ligue, on passe à une trentaine dans les années 1924, cinquante vers 1942, et on fixe le nombre à 70 en 1949 il y en a plus de 80 de nos jours. Au début, les clubs ne comptent que 9 joueurs, bien que le jeu se déroule avec 4 joueurs offensifs et 2 défensifs. Le nombre augmente quelque peu ensuite, et passe de 12 à 15 pour la saison 1929-1930. (2) p.124

Une remarque s’impose à propos de la grandeur de Georges Vézina. Dans « La glorieuse histoire des Canadiens » (p. 801) on lui donne 5pi. 6 po., alors que d’autres sources indiquent 6 pieds. Sur la photo de l’équipe de 1922-1923 (p.90) Georges paraît être plus grand que Sprague Clighorn, à sa droite, 5pi.10 po, et aussi grand que Billy Coutu, à sa gauche, 5 pi. 11 po. De plus, si Georges mesurait 5 pi et demi, il paraîtrait plutôt trapu avec ses 185 livres, ce qui ne se reflète pas sur les photos. Georges serait donc beaucoup plus près des 6 pieds que des 5 pieds et 6 pouces.

Georges était surnommé « le concombre de Chicoutimi ». Toute personne d’expression française qui entend ce vocable est étonnée et troublée, soupçonnant qu’elle cache quelque sens péjoratif. On peut, en effet, difficilement établir le lien de comparaison qui peut exister entre la personne désignée Georges Vézina et le légume du potager. Monsieur Jean-Patrice Martel (7), vice-président directeur de la Société internationale de recherche sur le hockey, me fit remarquer que l’expression anglaise « cool as a cucumber » est en usage depuis plus de 250 ans. Ses origines lointaines viendraient peut-être d’une croyance populaire voulant qu’il y ait plus de fraîcheur (dans un potager ou un champ de légumes) là où étaient semés les concombres. Toujours est-il que l’on trouve l’expression dans un texte poétique de John Gay «Poems, New Song on New Similies» publié en 1732. Au fil des ans, la formule acquit une couleur, un sens particulier, significatif dans la langue anglaise. L’expression est devenue consacrée, figurant aujourd’hui dans le dictionnaire et signifie, au sens figuré «calme, tranquille, sang-froid inébranlable» ce qui convenait alors parfaitement à ce gardien de but qui demeurait imperturbable dans les moments les plus critiques. Dans les années 1920, est-ce que les Canadiens français de Montréal et de Chicoutimi connaissaient le sens précis du terme anglais et le comprenaient ainsi lorsqu’il paraissait sous la plume d’un journaliste anglais? J’en doute. Il est bon, aujourd’hui, de savoir que l’expression, en elle-même, n’est pas péjorative.

Corrigeons aussi l’affirmation qui veut que Marie-Stella ait eu vingt enfants, vingt-deux selon d’autres sources, et même vingt-quatre enfants chez les journalistes encore moins sérieux. C’est après la mort de Georges que cette rumeur aurait pris naissance, alors que son ami Léo Dandurand, voulant de toute évidence faire une farce, avait répondu aux journalistes que : « Vézina ne parlait pas anglais et avait 22 enfants, dont 3 groupes de triplets, tous nés en l’espace de 9 ans ». Que les journalistes eurent prêté foi ou non aux paroles de Dandurand, ils n’en rapportèrent pas moins le propos, qui fut ensuite repris, sans aucune nuance. Avec les années, la boutade devint vérité. (6) On la retrouve encore aujourd’hui sur internet.
Georges et Marie-Stella Morin se marient le 3 juin 1908. Au registre des baptêmes de la paroisse St-François-Xavier, on relève qu’entre le 13 juillet 1909 et le 17 septembre 1918, Marie-Stella donne naissance, à tous les dix-huit mois environ, à neuf enfants dont six meurent en naissant, et un (Robert) qui vivra trois mois; Deux fils seulement parviendront à l’âge adulte: Jean-Jules né le 17 avril 1912, et Marcel-Stanley, né le 31 mars 1916. Ce dernier baptisé sous les prénoms Joseph Louis Marcel naît le lendemain de la victoire du Canadien contre les Rosebuds de Portland, alors que Georges est dans les buts, et que le club vient de gagner sa première coupe Stanley. C’est sans doute pourquoi il fut surnommé Marcel-Stanley , ce qui eut pour effet de conserver bien vivant dans la famille la mémoire de ce grand événement. À partir de 1919, je n’ai pas trouvé d’autres enregistrements de naissances à Chicoutimi. On est quand même loin des 20 ou 22 enfants qu’on attribue au couple!

Marcel-Stanley et Jean-JulesLes deux fils de Georges Vézina: Marcel-Stanley et Jean-Jules

D’où vient ce nom « coupe Stanley » qui fait partie du langage du hockey depuis si longtemps? « On est en 1892 et le hockey sur glace est devenu le sport d’hiver le plus populaire au pays. Lord Stanley of Preston, gouverneur général du Canada depuis 1888, acquiesce de bon gré à la demande de deux de ses fils (Arthur et Algernon, activement impliqués dans le hockey amateur) qui lui réclament un trophée pour récompenser la meilleure équipe de hockey sur glace au pays. Lord Stanley charge un membre de son personnel de lui dénicher un symbole pouvant servir aux besoins. Celui-ci trouve un grand bol en argent pour une dizaine de guinées (environ $50.) chez un marchand londonien. La coupe initiale, style grand saladier, sera posée sur un cylindre rectiligne, tout en hauteur. Cette base est remodelée pour la saison 1946-47 selon le format qu’on lui connaît aujourd’hui. C’est ainsi que la coupe Dominion Challenge fut offerte pour la première fois, en 1913, à une équipe de hockey… Au milieu des années 1890, on prend vite l’habitude de désigner la Dominion Challenge Cup sous le nom de « coupe Stanley ». (2) p. 40

Un des objectifs des deux ligues qui organisent le hockey professionnel est d’intégrer Le National, formé de joueurs Canadiens-français, afin d’y attirer la clientèle francophone. Les résultats escomptés se concrétisent rapidement et dépassent largement les limites de Montréal. La visite du Canadien dans les autres villes fait augmenter les assistances. « Grâce à l’équipe spectaculaire qu’il (Jack Laviolette) avait formée à l’origine, chaque fois que celle-ci se présentait à l’extérieur pour disputer un match, on se passait le mot chez les spectateurs : Les Flying Frenchmen sont en ville » (2) p. 46.

Georges Vézina contribue, en tant que gardien de but, à créer dans la Ligue nationale la réputation du Canadien (la National Hockey Association se saborde pour former, en novembre 1917, la Ligue nationale de hockey). Un club vaut ce que vaut son gardien et l’inverse vaut tout autant. Durant ses 15 ans de carrière avec le Canadien, Georges permit à son club, presque tous les ans, de terminer la saison parmi les meilleurs clubs de la ligue et de gagner deux fois la coupe Stanley : printemps 1916 et 1924. Lui-même reçoit six fois le titre de « meilleur gardien de la ligue», c’est-à-dire, celui ayant alloué le moins de buts à l’adversaire. Durant la saison 1923-24, Georges est au sommet de sa gloire avec une moyenne en saison régulière de 1.97 but par partie, et en 1924-25, une fiche de 1.81 par match. Ceci ne veut pas dire qu’il soit le seul excellent gardien du circuit. De 1915 jusqu’à la fin de sa carrière en novembre 1925, il a un fort compétiteur en la personne de Clint Benedict, gardien des Senators d’Ottawa, qui remporte huit fois ce titre. Le successeur de Georges Vézina dans les buts, George Hainsworth, réussira pas moins de 22 blanchissages en 44 parties, dans la saison 1928-1929. (2) p. 117

Georges Vézina demeure toutefois parmi les plus grands gardiens de buts que le hockey ait produit.
C’est un Georges Vézina éprouvant de sérieux problèmes de santé qui arrive à Montréal, à l’automne 1925, pour le camp d’entraînement. Il est affaibli et amaigri, il a perdu 35 livres depuis six semaines, « Le 18 novembre… son médecin le met au lit pour quelques jours, croyant qu’il souffre d’une bonne grippe. C’est avec une forte fièvre qu’il se présente au match inaugural contre la nouvelle équipe de Pittsburg, le 28 du même mois. À bout de force, il reste au vestiaire après la première période ». (2) p. 105 Certains chroniqueurs disent même qu’il vomissait alors le sang.
C’est la consternation chez tous les partisans du Canadien lorsque La Presse, le 4 décembre, annonce dans ses pages de sports : Vézina est beaucoup plus malade qu’on ne le croit. Il retourne très malade à Chicoutimi et ses jours comme joueur de hockey sont finis ». (5) p.40 Il est atteint de la tuberculose. Contraint de revenir chez-lui, au Saguenay, Georges demande toutefois à son ami Léo Dandurand, gérant du Canadien, la faveur de conserver le chandail qu’il portait durant la dernière série mondiale, alors que le Canadien gagnait sa 2è coupe Stanley au printemps 1924. C’est accompagné de son épouse et d’un de ses fils qu’il fait ce voyage. Il s’agit probablement de Marcel-Stanley, qui n’a pas encore 10 ans, puisqu’au mois de mars suivant, on télégraphiera au collège Ste-Marie, à Montréal, pour faire venir Jean-Jules auprès de son père mourant.

Georges est d’abord soigné à la maison par sa femme. Comme elle tombe elle-même malade, il doit être hospitalisé à l’Hôtel-Dieu de Chicoutimi. Sur le mur de sa chambre est accroché un crucifix et sur une petite table près de son lit, il y a la photo de sa femme Marie-Stella, qu’il a fait apporter « afin qu’il puisse l’avoir toujours sous les yeux ». Les journaux suivent de près l’évolution de sa santé. On fait aussi allusion à sa situation financière. « On a écrit, répond Mme Vézina à un journaliste qui l’interroge : « que nous étions dans l’indigence. D’autres ont répondu que nous nagions dans l’argent. Les deux choses sont fausses. Nous ne sommes pas riches, mais nous ne sommes pas non plus dans la misère. Plusieurs se demandent comment il se fait que Georges ne soit pas plus riche, car il faisait de bons salaires avec le Canadien (bien qu’il garde les buts durant une seule période, en 1925, le Canadien lui verse quand même son salaire annuel de $6,000.)(6). Il gagnait beaucoup d’argent mais il en dépensait beaucoup. Non en frivolité. Il a deux enfants qui lui ont coûté très cher. Ils ont eu plusieurs maladies. Son argent s’envolait en notes de médecins ». (3) Mme Vézina a aussi subi deux opérations chirurgicales, dont l’une a coûté $800.00.

Pierre Vézina, frère de Georges, président de l’Aréna de Chicoutimi, fait les réflexions suivantes : « Les journaux ont bien exagéré la situation financière de Georges. Il a un peu d’argent liquide; mais il est à le dépenser tout à l’hôpital. Tout est dans son commerce. Cependant il ne faut pas en déduire qu’il est dans l’indigence. Croyez bien que s’il venait à manquer de quoi que ce soit, nous nous porterions à son secours; car notre famille a toujours été très unie. Quand maman est morte (8-03-1921, à 63 ans) comme Georges était le plus jeune de la famille, elle me l’a confié ». (3)
« Modeste, silencieux, sans prétention (on l’appelait aussi l’habitant silencieux), trouve-t-on dans le journal La Presse, Vézina était non seulement aimé et estimé de tous les joueurs de hockey, mais de tous ceux qui s’intéressent à notre grand sport national d’hiver ». (5) Monsieur Charles Morin, son comptable, qui devint aussi son gérant d’entreprise déclarait : « la disparition de Georges va causer un tort énorme à la compagnie. Cet homme ne se remplace pas. C’était sa popularité personnelle qui nous amenait des affaires. Et puis, il était si bon ouvrier ! Il connaissait toutes les machines à la perfection et travaillait avec une rapidité extraordinaire ». En effet, chaque été Georges travaillait à son atelier. C’est au cours d’un été qu’arriva l’accident que révéla Marie-Stella après la mort de son mari : « un copeau de bois l’avait atteint à un œil (sous l’oeil). Il n’était alors qu’au début de sa glorieuse carrière avec le Canadien. Il a alors convenu avec son médecin de ne jamais dévoiler ce secret. Il ne voyait presque plus, mais jamais il ne s’en est plaint ». (4) Web : RDS pantheon /chroniques.

La maladie fait tranquillement son œuvre et les forces de Georges diminuent. Il souhaite avant de mourir voir son grand ami Léo Dandurand, copropriétaire et gérant du Canadien, ainsi que ses camarades de jeu. Georges décède le 27 mars 1926, âgé de 39 ans. « Pour venir en aide à sa femme, on organise diverses activités et les pièces de son équipement sont mises à l’enchère ». (2) Le 3 avril, La Presse annonce que « la partie du lendemain soir, entre le Canadien et les Crescents de Saskatoon, sera au bénéfice de la famille Vézina ». (5) Ce geste du Canadien n’est cependant pas unique; il l’a déjà fait dans d’autres circonstances.
Dès l’année suivante les propriétaires du Canadien décident d’honorer sa mémoire en offrant à la ligue le trophée Georges Vézina, pour être remis au gardien de but qui conserve la meilleure moyenne (buts alloués) de la saison. En 1945 Georges figure au nombre des 12 premiers joueurs admis au Temple de la renommée du hockey, à Toronto; et, en 1965, la ville de Chicoutimi donne à son aréna, le nom de Centre Georges-Vézina.

Les années 1925 et 1926 furent deux années très éprouvantes pour les membres de la famille, puisque leur père Georges, sénior, décède subitement le 16 mars 1925, à l’âge de 73 ans et 11 mois; Georges, cerbère du Canadien meurt le 27 mars 1926 et sa sœur Élisabeth, célibataire, est inhumée le 19 novembre 1926, âgée de 32 ans et 8 mois. Quant à Imelda (Mère Marguerite du Sacré-Cœur) elle décède le 15 juin 1927 à l’âge de 43 ans.
De son deuxième mariage avec Omer Larouche, Marie-Stella n’aura pas d’autres enfants. Elle décédera le 29 février 1968, à Saint-Jérôme, âgée de 79 ans environ. Son fils Marcel fut ingénieur de train sur le Canadien National et eut 3 garçons et 2 filles. Jean-Jules pratiqua le métier de barbier à Chicoutimi. Il eut un garçon et cinq filles dont Françoise, une des membres fondateurs de l’Association des Vézina d’Amérique, est celle qui, sur le DVD (Mme Gagnon) reçoit le trophée qui intronise son grand-père Georges au Temple de la renommée du Panthéon des sports du Québec, le 24 mai 1991.

Références :

  1. Dictionnaire biographique du Canada, vol XV (2005) , p. 1152
  2. La glorieuse histoire des Canadiens, éd. 100è anniversaire, par Léandre Normand et Pierre Bruneau, (2008)
  3. La Patrie, 16 mars 1926
  4. Web RDS Panthéon/chroniques
  5. Le Canadien : Un siècle de hockey à La Presse, André Duchesne, (2008)
  6. Wikipedia, NHL 1926
  7. Je remercie Monsieur Martel de m’avoir fait part de quelques judicieuses remarques, en particulier celle concernant cette expression « concombre… » et le fait que Stella Morin a eu non pas huit, mais neuf enfants.

Par : Gérard Vézina

GÉNÉALOGIE DE GEORGES VÉZINA

1ère génération : Jacques Vezinat marié à Marie Boisdon
contrat de mariage à La Rochelle, France
10-06-1640
2è génération : François Vezinat marié à Jeanne Le Marié
à Château-Richer
29-10-1670
3è génération : Nicolas Vézina marié à Thérèse Giroux à Beauport
marié à Marguerite Jolivet à L’Ange-Gardien
21-10-1708
29-07-1715
4è génération : Charles Vézina marié à Barbe Huot
à L’Ange-Gardien
25-01-1746
5è génération : Jean Vézina marié à Christine Cantin
à L’Ange-Gardien
09-11-1778
6è génération : François Vézina marié à Claire Moisan
à Notre-Dame-de-Québec
22-04-1817
7è génération : Jean Vézina marié à Éléonore Laberge
à St-Alexis de Grande-Baie
29-05-1848
8è génération : Georges Vézina marié à Clara Belley
à St-François-Xavier de Chicoutimi
05-04-1880
9è génération : Georges Vézina marié à Stella Morin
à St-François-Xavier de Chicoutimi
03-06-1908

GÉNÉALOGIE DE MARIE-STELLA MORIN

1ère génération : Jacques Vezinat marié à Marie Boisdon
contrat de mariage à La Rochelle, France
10-06-1640
2è génération : François Vezinat marié à Marie Clément
à L’Ange-Gardien
10-04-1679
3è génération : Pierre Vézina marié à Élisabeth Mathieu
à L’Ange-Gardien
22-02-1710
4è génération : Jean-Baptiste Vézina mairé à Geneviève Trudel
à L’Ange-Gardien
31-01-1757
5è génération : Jean-Baptiste Vézina marié à Euphrosine Bourgault
à St-Vallier de Bellechasse
06-07-1784
6è génération : Jean-Baptiste Vézina marié à Victoire Roy
à St-Vallier de Bellechasse
08-01-1822
7è génération : Urbain Vézina marié à Philomène Bolduc
à St-Vallier de Bellechasse
17-11-1857
8è génération : Flore Vézina mariée à Charles Morin
à St-Vallier de Bellechassev
20-07-1880
9è génération : Georges Vézina marié à Marie-Stella Morin
à St-François-Xavier de Chicoutimi
03-06-1908

NOTE: MARIE-STELLA MORIN est née le 27 janvier 1888, baptisée le 31 janvier 1888 , à la paroisse Saint-Roch de Québec, sous le nom Marie Adélaïde Stella. Son père est Charles Morin, « chauffeur sur les chars »